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Ces pensées qui abîment, Agence cybernétique de songerie adulte

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C'était le paysage

--> extrait

Dehors la vieille Europe d’Occident s’enlisait. La Francophonie crevait comme une chienne. Shakespeare défonçait Molière. Ali Baba aux portes de Panam, tout foutait le camp... comme toujours, les civilisations s’empoussiéraient, à la friche ! repli et oubli, plus personne avait rien foutre ! Guillotinée Marianne !
Oh... au fond... pas mon problème ! ni mon domaine... Black ou rabza importait guère. Les artistes se trouveraient toujours sous les peaux, toujours. Les cultures ! les cultures qu’iraient crever. Mais l’artisan artiste y survivrait, comme l’étoile brillant au crépuscule de nébuleuses culturelles, nébuleuses vouées au mouvement, l’échappée, la mutation, l’aliénation, l’accouchement suicidaire, suicidaire ! tandis que l’étoile fière illuminerait à jamais, bien après sa mort, au loin fin fond des mémoires, pour qui serait apte d’en recevoir le signal de rémanence, cette lumière posthume et nomade. Éternel souvenir immaculé.
La culture, cette décadence annoncée. Pouvait-on la sauver ? On échouait à se sauver soi-même... Et nous prétendions perdurer des idées, ces impalpables si fuyants ! Vraiment, nous ne manquions point d’audace !
J’écartai un tantinet la tenture ; la journée arborait ses nuages matinaux, léger gris sur fond blanc, assez cotonneux dois-je dire, et du bleu dans les trous. Quelques tâches noires, un banc d’oiseaux passait par là. Du gris encore, ah non, ça c’était des blocs à nous.
En fait, tout cela ne présentait strictement aucun intérêt ; je n’aimais pas la nature, en tout cas pas de façon contemplative. Comme tout le monde, j’avais appris à zapper.
J’allumai mon post d’intérêt ; j’optai pour une utilisation audiovisuelle passive dans un premier temps : Euronews nous invitait sur quelques chantiers d’Asie du Sud-Est Asie de l’Est, dans sa rubrique Perspectives. Cette fois c’était pour de bon, les gratte-ciel allaient vraiment gratter le ciel. Et c’était à qui mieux mieux la gratte, à croire que les hommes cherchaient des poux aux nuages. Ils avaient appris eux aussi, à zapper. La nature se prenait pas mal de liftings.
Je zappai.
Antenne2 nous apprenait qu’une fois de plus Tsahal avait frappé. Immédiatement je songeai à cette petite sotte de Charlotte. Sept civils dont trois enfants décédés ; le membre du Hamas visé avait semble-t-il échappé à l’attaque. En outre, nous apprenions que la communauté internationale déplorait fermement cet acte, hm, cet acte déplorable.
Dans la deuxième moitié du XXe siècle on avait pu croire que les Israéliens, et les Juifs en général, bénéficieraient d’un accès privilégié au malheur, selon le principe alors en vigueur, du droit automatique et absolu aux doléances. Et en effet, ils en avaient privilégié ; et douloureusement ; tout le monde savait ça. C’était vite devenu de l’histoire ancienne. À présent ils étaient passés de l’autre côté de la barrière : Ils avaient eu le malheur de prospérer. Les soupçons peu à peu s’étaient intensifiés, et le triste état de délabrement de leurs voisins avait accru le contraste. Le vent avait tourné, l’Holocauste s’était imperceptiblement mais sûrement inversé et vite on s’était rendu compte que le Hamas et le Hezbollah constituaient un partenaire crédible des associations de défense des droits de l’homme. Ils répondaient en tous points aux critères de recrutement : pauvreté, exotisme, détermination. Les Juifs par contre étaient démodés, opulents, et pas très coopératifs. Ils étaient devenus inéligibles à l’humanité. Des salauds parfaits. En plus, faut dire, ils visaient bien ces sales Feujs.
Le sujet abordé ensuite évoquait une pressentie catastrophe humanitaire quelque part sur le continent noir. Une guerre civile faisait rage suite à de louches élections, on dénombrait environ deux milles morts chez les rebelles, et plus de 700 dans les rangs de la milice présidentielle. C’était vraiment sans intérêt ; si ça n’avait pas été le cas, ça ferait longtemps qu’on serait retournés en Afrique mettre un peu d’ordre vu le nombre faramineux d’Occidentaux enragés du Bien dans le monde. Jamais l’ONU aurait toléré qu’un point de malheur névralgique s’éternise. Y avait pas à bisquer, toutes ces petites guéguerres c’était des carabistouilles. Non, le vrai problème, c’était les États-Unis d’Amérique. Le jour où on ferait tomber leur empire, la paix s’établirait évidemment dans le monde.
En gros, c’est ce que nous enseignait le système médiatique français. Mais ils n’étaient pas les seuls, Al-Jezira entretenait un point de vue assez similaire, un peu plus partisan certes, mais assez lucide, à la française.
Tout cela commençait à sérieusement me taper sur les nerfs, je me sentais de plus en plus juif. Par esprit de résistance. Et puis j’admirais ce peuple qui avait tout traversé : exodes, discriminations, Génocide, et finalement la haine d’un milliard de Musulmans. Non vraiment, chapeau.
Par curiosité, je passai en revue quelques chaînes européennes. Même si je ne comprenais pas leurs langues, je comprenais que la France n’était que le sommet de l’iceberg, la cerise sur le gâteau : les Juifs décidément, dérangeaient tout le monde. Y avait comme un malaise. Or nous vivions le règne du no malaise ; il incombait de résoudre l’inadmissible problème des Juifs. Suite à quoi les dictatures arabes tomberaient l’une après l’autre. Personne n’en doutait, le problème avait été clairement identifié.
J’abandonnai toute idée d’information. Aujourd’hui c’était le plein, j’étais sevré d’événements.
" On mange la soupe ! – oui, j’arrive... "

Ecrit par Jokeromega, le Mercredi 2 Août 2006, 17:11 dans la rubrique "Chantier fermé".