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Ces pensées qui abîment, Agence cybernétique de songerie adulte

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Les morts s’en moquent, alors à quoi bon…

Ce lieu est une banquise où mes émotions viennent s’échouer. Ou une île déserte, quelque chose de cette ordre-là.
J’alterne les passages à vide et les grands désarrois. Hm… Je n’aime pas trop ainsi étaler son impudeur, d’abord parce que parfois je voudrais le reprocher aux autres, encore qu’au fond je comprenne très bien et tolère pas mal, ensuite parce que je m’en demande la pertinence intellectuelle… Mais arrive ce moment où tout cela n’a plus trop d’importance, à force de saturer on finit par déborder. Là, tout de suite, j’avais envie d’écrire " Oh rien de dramatique, on reprend vite le poil de la bête " ou quelque chose de cet effet, car toujours je me rebiffe contre l’état de faits, ne pas se laisser aller, etc.. Mais les plus beaux costumes finissent eux aussi par s’user.
Je me méfie de cette impudeur aussi parce que trop flagrante on peut se demander sa réalité, comme si la discrétion était plus digne et plus profonde. C’est comme, à la télé, le journal parlé ou les documentaires chocs, je vois des mêmes malheurs mais des réactions différentes me traverseront le corps selon que les malheureuses personnes en feront des tonnes, se mettront à hurler tous les grands Dieux, si bien que de pareilles il me semble – mais c’est arbitraire – simagrées me laisseront pour ainsi dire de marbre alors que confronté à la souffrance discrète et contenue j’ai du mal de mon côté alors à contenir l’émotion, je compatis en spontané. Ça me touche. Je pense que la compassion est une affaire de sensibilité, il faut non seulement que celui qui compatisse soit doué d’une âme sensible mais qu’en plus ceux à qui s’adressera sa compassion lui soient dignes de sensibilité, qu’ils lui évoquent sa propre affinité, que ça lui parle, d’ailleurs, pourquoi sommes-nous tant touchés pour un homme meurtri plus que pour mettons, un lézard, parce qu’on peut s’identifier, on peut identifier la douleur, on se projette. La compassion est arbitraire et intéressée, elle n’a d’altruiste que ce qu’elle nous rappelle de nous-mêmes. Celui qui pleure un animal domestique plutôt qu’une vache c’est que ça l’intéresse le chat, le chien, le hamster et autre gentille bébête, et celui qui pleurerait la vache c’est que la vache ça lui évoque plus que le poisson ou le crustacé, et ce n’est rien d’indigne justement, que la compassion cherche à se nourrir de remous qui émanent dignement des candidats à son amour, c’est très naturel, c’est comme ça.
Mais je m’éloigne du sujet premier qui concernait des états d’âme strictement personnels. On commente les autres pour s’oublier soi-même. Et ça marche, oui c’est comme cela que j’ai survécu tout ce temps, je suis d’ailleurs persuadé qu’un bon comédien peut pour ainsi dire tout ou presque surmonter, il est un inoxydable du tourment car il en fait son acte comique ou tragique, mais toujours il s’y fournit, c’est du vice de survie. Quoiqu’à bien y réfléchir, c’est pas comme si on avait eu le choix. Ça tombe dessus sans rien prévenir et puis on traite avec selon ses moyens, et l’acteur est un être qui toujours rebondira, cela ne signifie nullement qu’il soit heureux, quoi! ça se trouve, même son bonheur est feint mais jamais il s’affaissera au néant, jusqu’au dernier souffle il aura les ressources, car l’acte de comédie existera tant qu’existera une scène, quelle que soit cette scène, jusqu’au bout. Ceux qui mettent fin à leurs jours ne savent pas jouer la comédie, et s’ils pensent le contraire ils se trompent. De toute façon il est plus optimal de pleurer les vivants, c’est là que se joue le malheur. Je sais qu’on n’arrivera jamais à l’accepter mais comprendre je sais très bien le faire, de me dire que les vivants attendent leur mort alors que les morts sont réduits à l’inconscience absolue et comme seule la conscience apporte la souffrance, les morts sont des êtres tranquilles, pourquoi les pleurer ! Ni heureux ni malheureux ils sont des entités stables, pas de quoi s’inquiéter. Quant aux regrets des êtres chéris d’autrefois, ils sont ces regrets tout ce qu’il y a de plus humain, inutile et attendrissant.
Mais au fond tout cela m’est bien égal, je suis vivant et chaque jour m’est a priori une corvée supplémentaire et vu que je me sais excellent comédien, ça va durer encore un bon bout de temps comme ça. Les personnes suicidaires ne connaissent pas leur chance, elles ont une issue, elles. Plus on est vivant et plus on est proche du problème, le quotidien en plein dans la mire de la conscience. Le comédien éternel ne pourra jamais s’effondrer totalement, il lui en reste toujours assez, assez de comédie que pour prolonger l’embarcation branlante et puante. Il la porte jusqu’au bout sa croix, le vrai sacrifice ce fût la vie de Judas s’il ne s’était pas avec facilité pendu, Jésus lui c’était l’appel du père, fastoche ! Quelques heures au supplice puis on n’en parle plus, sauf les survivants bien sûr, encore là deux milles ans plus tard ! C’est coriace les vivants ! 
Je n’ai jamais compris tous ces croyants (en la vie après la mort) qui se permettaient le luxe audacieux de pleurer les morts, quelle absurdité ! Je me souviens, lorsque petit je croyais dur comme fer à cette gentille consolation de la vie après la mort, les nouvelles de décès ne me suscitaient pas le moindre sentiment de tristesse, pourquoi dont ! Ils étaient juste ailleurs, et c’était là un processus naturel et annoncé. Il suffisait d’être patient, on les reverrait puis voilà tout ! Le croyant (en la vie après la mort)qui pleure est un hypocrite ou un comédien. Feindre sa foi ou jouer son chagrin, entre les deux il ne peut qu’y avoir un septique sincère, celui qui ne sait pas ou ne croit pas. En ce qui me concerne je suis de ceux qui ne savent pas, mais j’ai ce sentiment persistant que je ne vois pas pourquoi tout ceci, si c’est pour avoir une deuxième chance. La mort est très bien établie ainsi pour qu’on y retouche quoi que ce soit. C’est une affaire à accepter. Qui de toute façon s’impose d’elle-même. En fin de compte, les septiques ou les athées ont le plein droit de pleurer les morts, par nostalgie, mais jamais pour les morts eux-mêmes, parce que le " on ne saura jamais tout ce qu’ils auraient pu faire et devenir ", n’est valable que pour les vivants spectateurs, un mort est en rupture absolue avec ce genre de détails factuels relevant du strict domaine des vivants, un mort est indifférent à tout.
Toujours est-il que j’ai réussi à raconter toutes sortes d’affaires pour bien dévier de mon sentiment initial. La comédie, et rien d’autre !

Ecrit par Jokeromega, le Vendredi 23 Décembre 2005, 18:50 dans la rubrique "2.Intellections".