Hier soir j’ai écrit le message de la poursuite mais ce soir, ce soir…
J’ai une deuxième adresse courriel, que j’utilise peu souvent, j’ai eu la mauvaise idée d’y jeter coup d’œil. Deux messages, dont un cinglant. Ça ma dévasté. Terrible, je n’en pouvais plus, je n’ai plus la carrure pour, je suis bien trop fébrile, au bord de tout je vacille. Tant pis si j’enfreins mes propres règles tacites qui m’ordonnaient un tant soit peu la pudeur nécessaire et l’esquive de plaintes indignes et sans issue, ça m’est égal, au point où j’en suis. Je me demande à quoi bon tout ceci, j’ai bien cherché des échos mais dans l’ensemble, dans l’ensemble écrasant, rien, non il n’y a aucune raison de se réjouir, je vais à perte, je vais à nulle part, je vais au malheur. C’est très nul et très insignifiant ce que j’écris là, ça ne vaut rien mais bon, ça occupe, voilà, ça occupe. Réduit à cela. Je pensais toucher à la grâce parfois, il m’avait semblé être inspiré, comme si au moins l’écriture m’était elle amie, au moins elle, mais j’ai l’impression de prêcher dans le désert, moi qui n’aime ni les prêches ni la solitude accablante des déserts... Et pourtant, il n’y a que ça à perte de vue, je ne vois que ça dans l’avenir, à ce rythme-là le vide se dessine éternel dans les lignes de la main. Suis-je capable de rebondir me ressaisir... Je ne sais pas, à trop s’enfoncer on devient irrécupérable. Ça m’a détruit ce message, le coup de grâce presque, encore un peu et mon compte y sera, je l’ai bien senti. Je suis au bout de bien des ressources, mes efforts déjà insuffisants sont tombés trop souvent à l’eau et je me demande si réellement... je... je n’ose même prononcer le désespoir tel quel, trop humiliant.
Ce n’est pas possible, pourtant je voyais clair, m’avait-il semblé, si limpide, je ne peux pas tant m’être trompé, des bêtises encore, mais à ce point s’être bercé d’illusions, moi qui étais déjà tant lucide, ce n’était donc point encore assez ? Je sers à quoi, dans ce cas ? Si mon travail mon seul véritable dessein n’a que peu de valeur, ou pas de valeur ? Suis-je si indigeste que cela, si fatiguant, si lourd et médiocre ? Je n’en peux plus de tout cela, ç’en est trop, bien trop, toute tentative s’effondre. Je veux tout ou ce sera rien. L’entre deux ne m’intéresse pas. Qu’il crève alors ! Hé bien, oui, il crève.
J’espère trouver le sursaut et le réconfort mais cela tient de plus en plus de la naïveté ou du miracle. Et je ne suis pas béni ni crédule. Je le vois le dessin du futur, je le vois arriver, et ses traits ne vont pas heureux, ils s’endurcissent je le sais, je le sais... Hé puis, à quoi bon ! Si je ne possède les mots légers ni ne captive, si je saoule si je suis lourd, si je fais plouf quand je m’exprime, alors à quoi bon, oh au diable tout ça, au diable, au feu, je n’en peux plus. À quoi bon, à quoi bon, à quoi bon… Du balai, oust, on n’en veut plus. Qu’il sombre ! J’ai bien entendu, qu’on se rassure, je m’y applique chaque jour un peu plus.
à 11:29